Obligation de loyauté et vente de fonds de commerce
Chacun de nous a une bonne représentation de ce que l’on appelle communément l’obligation de loyauté.
Mais savez-vous ce qu’elle implique réellement, notamment en matière de vente de fonds de commerce ?
Le principe fondateur et fondamental en pareille matière est celui de l’obligation de négocier tout contrat de bonne foi, tel que défini par l’article 1104 du Code Civil qui impose aux parties d’adopter un comportement loyal dans les relations précontractuelles : « les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi ».
Cette obligation de bonne foi passe naturellement par une obligation d’information expressément prévue et formulée à l’article 1112-1 du Code Civil : « Celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant. Néanmoins, ce devoir d’information ne porte pas sur l’estimation de la valeur de la prestation. Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties. Il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie. Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir. Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d’information peut entraîner l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants. »
Ces principes, regroupés sous l’appellation « obligation de loyauté », s’appliquent à tous les contrats dont les contrats conclus en matière de vente de fonds de commerce.
Ainsi, l’article L. 141-1 du Code de commerce met à la charge du vendeur d’un fonds de commerce une obligation d’information relative aux principaux attributs et caractéristiques du fonds.
Et c’est précisément ce qui a été jugé/rappelé par la Cour de Cassation le 6 janvier 2021 (n°18/28.0698) en considérant que le fait de pas informer l’acheteur d’éléments importants tirés du règlement de copropriété, lesquels ont une incidence directe sur les conditions d’exploitation du fonds de commerce, contrevient à l’obligation de loyauté dont est redevable le vendeur.
En l’espèce, le règlement de copropriété excluait les commerces susceptibles de gêner les autres copropriétaires par le bruit ou les odeurs ; en outre, une décision d’assemblée générale subordonne l’exercice de l’activité de restauration dans l’immeuble à la condition qu’aucun client ne soit reçu sur place après 20 heures et que toute fabrication de plats sur place était interdite.
Or, ces éléments n’ont pas été portés à la connaissance de l’acquéreur, pourtant connus du vendeur.
La Cour de Cassation annule la vente, considérant que le vendeur a commis une réticence dolosive (mensonge par omission) de nature à tromper l’acquéreur sur les conditions d’exploitation du fonds de commerce.
En conclusion, il est important pour le vendeur de ne rien cacher à son acquéreur potentiel à peine de voir la vente annulée. Assisté de son conseil, il doit faire preuve de vigilance et ne rien négliger de l’information portée à son acquéreur sur les conditions d’exploitation de son fonds de commerce afin de lui apporter une information claire. La vente n’en sera que plus facile…
Olivier GÉDIN
Avocat au Barreau de Paris